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Détection des chaleurs Quand la vache cache les signes

L’expression des chaleurs est variable à la fois en intensité, en durée et par le moment où les signes s’expriment. Les chaleurs des vaches laitières sont conjointement plus discrètes et plus courtes qu’auparavant. Une évolution qui ne facilite pas la tâche des éleveurs pour les détecter.

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« Des études montrent que le taux de vaches acceptant
le chevauchement avant l’ovulation a considérablement
diminué. » (© Terre-net Média)

Chez la vache Prim'Holstein, le nombre d’ovulations, et donc de chaleurs potentielles, est réduit du fait des nombreuses anomalies de cyclicité rencontrée par la race. L’expression des chaleurs, qui repère l’ovulation, est indétectable extérieurement. Cette expression des chaleurs est variable, en intensité, en durée et par le moment où les signes s’expriment.

« Les chaleurs des vaches laitières sont à la fois plus discrètes et plus courtes qu’auparavant , explique Catherine Disenhaus (Inra/AgroCampusOuest). De plus, en race Holstein, les nombreuses anomalies de cyclicité réduisent le nombre d’ovulations et donc de chaleurs potentielles. » Ceci complique encore la perception des cycles ovariens par l’éleveur.

Des variations qui compliquent la détection

Pour bien détecter les chaleurs, il faut donc que la vache qui ovule le fasse savoir. Cette expression marque bien le début de l’ovulation, dans la mesure où physiologiquement, les chaleurs (ou œstrus) sont définies par l’ensemble des phénomènes physiologiques et comportementaux qui précèdent et accompagnent l’ovulation chez la femelle des mammifères.

Or, « d’une vache à l’autre et d’un cycle à l’autre, les rapports chronologiques entre le début des chaleurs, le pic d' hormone lutéinique (LH) et l’ovulation sont variables », détaillait la scientifique de l’Inra. Cette variabilité rend donc difficile le choix du moment optimal de l’insémination.

Découplage partiel du contrôle de l’ovulation et des chaleurs

Une réduction préoccupante de la durée des chaleurs

Dans les études synthétisées pour cette grande enquête, une grande variabilité de la durée des chaleurs a été rapportée : de 4 à 36 heures chez les vaches adultes.
La durée des chaleurs en race Holstein, de la première à la dernière acceptation de chevauchement, était évaluée à 18-20 heures dans les années 80.
Les études de ces dix dernières années rapportent une durée de 4 à 8 heures dans les mêmes conditions.

L’analyse d’études menées sur le sujet ces dernières années montre que « le début des chaleurs est concomitant avec le pic de LH conduisant à l’ovulation, voire postérieur ». Les auteurs ont rapporté que la variation de l’intervalle entre le début des chaleurs et le pic de LH expliquait 80 % de la variation observée entre le début des chaleurs et l’ovulation.

« Dans leur ensemble, ces études suggèrent un découplage partiel du contrôle de l’ovulation et des chaleurs » : en clair, la concentration en œstradiol serait suffisante pour déclencher le pic de LH, et donc l’ovulation, mais insuffisante pour déclencher les comportements.

Ce découplage expliquerait également certaines « ovulations silencieuses » observées, comprenez des ovulations sans aucun signe comportemental.

« À l’inverse, une forte concentration plasmatique en œstradiol, secrétée par le placenta ou suite à des injections d’œstrogènes, peut générer des comportements de chaleurs alors qu’il n’y a pas d’ovulation » poursuivait Catherine Disenhaus. Il faut donc bien distinguer les facteurs de variation de l’expression comportementale et les facteurs d’ovulation.

L’acceptation de chevauchement : un signe parmi d’autres

Outre la variabilité physiologique, l’éleveur doit également faire avec la variété d’expression de l’animal.

Persistance du corps jaune

Après vêlage, la grande majorité des vaches (en moyenne 83 %) reprend une activité ovarienne avant 50 jours. Chez les autres, cette reprise peut être parfois très tardive, à savoir au-delà de 100 jours après vêlage.

« Selon les études récentes, seules 40 à 70 % des vaches Holstein ont un profil de cyclicité normal après vêlage ; 15 à 35 % présentent un corps jaune qui persiste (encadré) – parfois longtemps – avec comme conséquence un taux élevé de progestérone empêchant l’ovulation. Enfin, entre 5 et 10 % des vaches ont une activité ovarienne qui s’interrompt pour une durée variable : au cours de cette période, aucune chaleur ne pourra être observée », détaillait la scientifique.

La persistance des corps jaunes a jusqu’ici été peu étudiée, mais il semble que ce soit un problème de la race Holstein. « En effet, chez les vaches Normande, 92 % des vaches ont repris leur cyclicité avant 50 jours et seules 8 % ont présenté un corps jaune persistant. Dans la race Montbéliarde, la reprise semble plus tardive. Au final dans ces 2 autres races, une fois la cyclicité rétablie, la régularité des cycles comme la fréquence des ovulations étaient meilleures, augmentant la fréquence et en conséquence la détection possible des chaleurs. »

Dans les années 70, les scientifiques considéraient « qu’une vache laitière était en chaleurs si elle acceptait le chevauchement au moins 3 fois ou si elle tentait de chevaucher une congénère au moins 6 fois ». L’acceptation du chevauchement permettait donc, selon eux, de détecter une ovulation sur deux en race Holstein.

Aujourd’hui, cet indice est largement insuffisant. En effet, des études montrent que le taux de vaches acceptant le chevauchement avant l’ovulation a considérablement diminué.

Des études menées avec des détecteurs électroniques de chevauchement en observation continue menée en 2002 et 2004 ont montré que « seules 6 ovulations sur 10 étaient accompagnées d’acceptation de chevauchement, et préférentiellement entre 1h et 7h du matin ».

Une nouvelle approche comportementale

Dans les années 90, une nouvelle approche comportementale des chaleurs, basée sur une grille d’observation, a été faite. Cette grille repose sur plusieurs comportements sexuels à qui l’on attribue des points, avec, par ordre d’importante : l’acception de chevauchement, la recherche de congénère, pose du menton sur la croupe, reniflement de vulve et cajolements (lire ici). « Aucun de ces signes n’est spécifique mais l’augmentation de leur fréquence est significative de la période d’œstrus », résumait Catherine Disenhaus.

Sur cette base, l’observation de 4 comportements en  quinze minutes d’observation permet de détecter 100 % des vaches ayant ovulé avec seulement 3 % de vaches détectées en chaleur alors qu’elles étaient en phase lutéale. « Ces signes sont très brefs, de 1 à 5 secondes, et nécessitent une attention soutenue pour les repérer. »

Enfin, l’augmentation de l’activité (déplacements et changements d’allure plus fréquents) reste un signe qui doit alerter l’éleveur : en effet, une vache en chaleurs se déplace significativement plus et reste moins longtemps couchée que cette même vache en phase lutéale.

Pour aller plus loin

Institut de l’élevage : www.inst-elevage.asso.fr.
Journée 3R : www.journees3R.fr

 

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